RD Congo : Assassinats des experts de l’ONU au KASAI, l’étau se resserre sur l’État congolais.
Selon le journal « The Guardian » de Londres du 08 mai 2017 : beaucoup de questions, peu de réponses.
Les experts disent que les images des derniers
moments des travailleurs de l'ONU Michael Sharp et Zaida Catalán compliquent
les affirmations selon lesquelles les rebelles de Kamwina Nsapu étaient
responsables de ces assassinats. Dans la vidéo, les tueurs des travailleurs de
l'ONU parlent français et Lingala, les deux langues officielles de l'armée
congolaise, selon un expert qui a analysé les séquences vidéo des meurtres.
La vidéo montrant les meurtres de deux travailleurs de l'ONU a été diffusée le mois dernier et était sensée disculper le gouvernement congolais et surtout prouver que les milices locales étaient derrière ces deux assassinats. Cette vidéo visualisée par les journalistes à Kinshasa, montre les derniers moments avant les meurtres de l'américain Michael Sharp et de sa collègue suédoise Zaida Catalán, qui a ensuite été décapitée.
Les deux agents de l’ONU travaillaient dans la
région du Kasaï, où ils enquêtaient sur les activités du groupe rebelle Kamwina
Nsapu, que le gouvernement a déclaré être responsable des meurtres. Les experts
sur le terrain ont toutefois exhorté l'ONU à mener une enquête plus
approfondie. Ils disent que les images soulèvent plus de questions qu'elles ne
donnent des réponses et ne permettent pas d'exclure l'implication possible du
gouvernement dans les décès.
Est pris qui croyait prendre ?
Une source travaillant pour une ONG a déclaré au
Guardian: "les aspects les plus importants de la vidéo et les questions
qu'ils posent semblent avoir été ignorés par la communauté internationale. Pour
une raison simple, il faut avoir des compétences pour analyser les langues
utilisées ". Cette vidéo est issue d’une caméra cachée. On y voit les
enquêteurs marcher avec leurs tueurs et apparemment à l'aise avant de s'asseoir
dans une clairière et on attend un coup de feu partir, tuant Sharp.
Dans la vidéo, les ordres pour exécuter Catalán -
"Tirer, tirer lisusu", signifiant "Tirer, tirer à nouveau"
- sont donnés dans un mélange de français et de Lingala. Les deux agents sont
ensuite filmés, sanglants au sol, avant que certains des cheveux de Catalán ne
soient enlevés et qu'elle soit décapitée.
Ils marchent confortablement, leurs mains ne sont pas liées. Ils ne donnent pas l'impression qu'ils sont pris en otage "la milice locale, Kamwina Nsapu, parle Tshiluba, mais les ordres sont donnés en français et Lingala, les deux langues officielles de l'armée nationale", a expliqué l'expert. "Michael a été abattu et Zaïda se lève et court - c'est un moment à risque élevé dans lequel vous utiliserez la langue qui vient la plus naturellement".
La source, dont l'identité est protégée pour des
raisons de sécurité, a déclaré que le film a également prouvé que les deux
agents de l’ONU n'ont pas été enlevés, comme le disait le gouvernement
congolais lors de son point de presse du 12 mars de cette année, avec leur
interprète, Betu Tshintela. Les corps de Sharp et Catalán ont été découverts
deux semaines plus tard.
Les experts de l’ONU ne seraient jamais pris en otage
"Il n'y a jamais eu d'enlèvement - ce que montre la vidéo est une
mise en scène", à déclarer la source. "Ils se promènent
confortablement, leurs mains ne sont pas liées, Michael pose des questions et
est clairement en mode de collecte de preuves. Ils n'ont pas l'impression
qu'ils sont en otage. "
La source a ajouté: "Il est essentiel que
l'ONU s'engage à mener une enquête complète pour établir la vérité et la
véritable identité les auteurs de ces deux assassinats".
Les hommes vus avec Sharp et Catalán portent des
bandeaux rouges caractéristiques de la milice locale de Kamwina Nsapu, mais les
experts disent qu'il serait rare qu'une milice de la région filme un crime de
cette façon.
Philip Clark, un politologue spécialisé dans les conflits en Afrique, a déclaré que le gouvernement de la RDC n'a jamais accordé une couverture aussi importante aux atrocités présumées commises par des groupes rebelles. "Il y a certainement quelque chose d'inhabituel qui se passe ici", a déclaré Clark. "Il semble très particulier qu'un groupe rebelle filme ses propres crimes, en particulier dans un tel meurtre de haut niveau.
"Si elles devaient faire cela à des fins de
propagande, alors pourquoi utiliser une caméra cachée? Pourquoi ne pas le
distribuer eux-mêmes? "
D’autres pistes sont aussi examinées.
Les spécialistes des conflits travaillant dans la
région ont suggéré une collusion entre ceux qui travaillent pour les autorités
et la milice locale comme une autre explication possible.
L'un d'eux a déclaré: «Il fait partie du mode de
fonctionnement régulier du gouvernement de travailler avec les rebelles, et le
Kamwina Nsapu est assez fragmenté, avec une branche plus proche du
gouvernement. Ils ont peut-être trouvé des membres voyous du groupe - nous ne
le savons pas. "
Cependant, Clark, qui enseigne la politique
africaine à l'Université Soas de Londres, a déclaré que, le gouvernement de
Joseph Kabila, utilise de temps en temps de rebelles, pour lui faire certains
sales boulots.
"Il serait difficile de croire qu'ils ont soudainement
formé ce type d'alliance dans une attaque aussi risquée et de haut niveau,
parce que les tensions entre les deux camps ont été très élevées".
Après la diffusion de la vidéo d'exécution de deux
experts de l’ONU, le ministre des communications du gouvernement, Lambert
Mende, a déclaré que les images avaient été tournées par la milice et
sécurisées par la police. Il a déclaré aux médias: "Notre police et nos
soldats sont accusés d'être impliqués dans l'assassinat des deux experts de
l'ONU. Ce n'est pas le cas. Les images parlent d'elles-mêmes. Il a ajouté:
"ce ne sont pas nos soldats que nous voyons dans la vidéo exécutant les
deux travailleurs de l'ONU, mais les terroristes de Kamwina Nsapu".
L’enquête en cours des Nations Unies ne conforte
pas les affirmations de MENDE. Pourquoi la RDC traine-t-il les pieds pour aider
les enquêteurs de l’ONU ? A t-il quelque chose à cacher ? S’il s’avérait
qu’après enquête de l’ONU que le gouvernement congolais serait impliqué, d’une
façon ou d’une autre, aux assassinats de Michael Sharp et de sa collègue
suédoise Zaida Catalán, KABILA doit se faire des soucis. Si la vie d’un
Congolais ne vaut rien pour lui, celle d’un Américain vaut beaucoup.
Mata POLELE
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